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La clause de non-concurrence : principe et règles

Par Frédéric , le 12 mai 2023
La présentation de la clause de non-concurrence au salarié

Un salarié peut quitter son travail du jour au lendemain. Dans ce cas de figure, son employeur peut interdire ce dernier d’exercer une activité concurrentielle ou d’être embauché dans une entreprise concurrente. Toutefois pour que cette interdiction soit valable, une clause de non-concurrence doit être écrite dans le contrat de travail. Elle a pour objectif de prévoir les obligations des parties prenantes — employeur et employé — qui vont être effectives après le départ du salarié de l’entreprise, soit après la rupture de son contrat de travail.

Nous vous dévoilons dans cet article ce qu’est une clause de non-concurrence, le principe et les conditions de validité.

Définition de la clause de non-concurrence

Contrairement à certaines obligations qui doivent figurer dans un contrat de travail et qui sont fixées par le Code de travail, la clause de non-concurrence est plutôt définie par la jurisprudence. En effet, la notion de clause de non-concurrence ainsi que ses critères de mise en place ont été, au fur et à mesure, déterminés par les juges.

Une clause de non-concurrence permet à une entreprise de protéger ses intérêts en interdisant un salarié, dès la rupture de son contrat de travail, de travailler dans des fonctions concurrentes, dans une entreprise ou à son compte, pendant une certaine durée et dans un certain secteur géographique.

La clause de non-concurrence peut ne pas concerner toutes les fonctions professionnelles. Elle peut ne s’appliquer qu’à des catégories de salariés précis, comme des collaborateurs de l’entreprise ayant des compétences techniques, des savoir-faire spécifiques ou qui ont occupé un poste clé. Ces éléments peuvent alors justifier la mise en place d’une clause de non-concurrence.

Pour protéger les intérêts du salarié et sa liberté, l’entreprise doit lui verser une compensation financière en plus de son solde de tout compte.

Bon à savoir

La clause de non-concurrence est différente de la clause d’exclusivité, qui s’applique pendant la validité du contrat de travail. Une clause de non-concurrence est effective en fin de contrat (rupture à l’amiable, démission).

Un salarié quittant sans emploi et doit respecter l'interdiction de concurrence

Objectifs de la clause de non-concurrence

Lorsque la cause de non-concurrence s’applique à l’issue de la rupture d’un contrat de travail, que ce soit à la fin du préavis du salarié ou à la date de son départ effectif de l’entreprise (dispense de préavis), la restriction de sa liberté s’applique. Plus concrètement, si le contrat de travail mentionne une telle clause, le salarié est interdit de concurrencer son ancien employeur en exerçant une activité équivalente à la précédente. Toutefois, il peut travailler dans une entreprise concurrente à un poste différent du précédent.

Il est notamment important de préciser que cette clause doit remplir certains critères pour pouvoir être valide. Le cas échéant, elle sera considérée comme abusive. Dans une telle éventualité, la clause de non-concurrence peut être annulée et donne droit à des dommages et intérêts.

Le choix d’intégrer une clause de non-concurrence dans un contrat de travail dépend de l’employeur. Cependant, il n’est pas en droit d’imposer à son salarié de valider un contrat qui fait mention d’une telle clause. Le salarié peut ainsi refuser de signer un contrat avec une clause de non-concurrence. Par contre, une signature engage ce dernier à respecter les obligations qui y sont liées.

Les principes fondamentaux de la clause de non-concurrence

La mise en place d’une clause de non-concurrence doit être justifiée par plusieurs points. 

Protection des intérêts légitimes de l’entreprise

Les entreprises trouvent utile d’intégrer une clause de non-concurrence dans un contrat de travail, pour protéger les intérêts qu’elles considèrent comme légitimes. Il leur appartient alors de définir la limite et les caractéristiques de cette protection, les risques que cela représente surtout pour elles si le salarié venait à travailler pour ses concurrents.

Il est néanmoins à noter que la notion d’intérêts légitimes peut être prise selon le cas présent, c’est-à-dire selon l’activité exercée par le salarié ou le poste occupé ainsi qu’en fonction du secteur de l’entreprise.

Limitation de la liberté de travail de l’employé

Comme le salarié s’engage à respecter cette interdiction de concurrence envers son ancien employeur, ce dernier a également des obligations qu’il doit respecter. De manière plus concrète, l’employeur doit laisser la possibilité à celui-ci de reprendre normalement une activité professionnelle. La clause de non-concurrence n’a pas uniquement vocation à protéger les intérêts de l’entreprise. Les intérêts qu’elle propose doivent être équilibrés entre les deux parties prenantes. À ce titre, dans le cadre de son appréciation, l’employeur n’est pas en droit d’empêcher le salarié de retrouver un nouvel emploi. Il se peut qu’il soit engagé dans une entreprise concurrente, mais à un poste différent du précédent, ce qui n’est pas proscrit.

L’employé peut ainsi exercer une fonction conforme à ses connaissances, sa formation et son expérience professionnelle.

Équilibre entre les intérêts de l’employeur et les droits de l’employé

Selon la jurisprudence, la clause de non-concurrence ne doit porter pas préjudice au salarié dans sa recherche de nouvel emploi. L’entreprise doit ainsi tenir compte des principaux éléments qui vont suivre :

  • L’expérience professionnelle et l’ancienneté du salarié dans son secteur d’activité. La fonction ou l’activité faisant l’objet d’une interdiction doit être correctement analysée par l’entreprise pour ne pas restreindre inutilement son ancien employé (exerçait-il cette activité depuis plusieurs années ou pendant une période assez courte ?) ;
  • Les formations suivies et les compétences acquises qui sont relatives à la restriction imposée. À dire vrai, la clause de non-concurrence est plus stricte pour les salariés d’une entreprise qui détiennent des compétences techniques ou des savoir-faire précis et techniques.

Les règles relatives à la clause de non-concurrence

Nous l’avons mentionné plusieurs fois, une clause de non-concurrence doit être expressément mentionnée dans le contrat et respecter plusieurs conditions pour être valide. Ces conditions sont cumulatives, c’est-à-dire que le non-respect de l’une d’elles signifie que la clause de non-concurrence n’est pas valable.

Conditions de validité de la clause de non-concurrence

Les conditions nécessaires à la validité d’une clause de non-concurrence sont ;

  • La protection des intérêts légitimes de la société. Le salarié constitue une valeur ajoutée pour l’entreprise dans laquelle il a travaillé de par ses compétences commerciales ou techniques. Son ancien employeur peut estimer que son départ peut porter préjudice à son activité, qu’il se mette à son compte ou travaille pour une entreprise concurrente ;
  • La limite dans le temps. L’interdiction de concurrence ne doit pas être trop longue, sinon elle sera considérée comme abusive ;
  • La limite dans l’espace. Il s’agit ici de définir les zones géographiques dans lesquelles le salarié ne peut exercer son activité. Elle doit également être bien précisée dans la clause sous peine de la nullité de cette dernière ;
  • La contrepartie financière. L’entreprise est tenue de verser une indemnité compensatrice au salarié, compte tenu du degré de restriction qui lui est imposée ;
  • Les spécificités de l’emploi du salarié. L’entreprise n’est pas en droit de restreindre le salarié de retrouver du travail. Il peut ainsi postuler pour des postes conformes à sa formation professionnelle, ses aptitudes et ses connaissances générales.

La signature d'un contrat de travail avec la mention d'une clause de non-concurrence

La durée de validité d’une clause de non-concurrence

Après la rupture du contrat de travail, la durée de validité maximale d’une clause de non-concurrence est de deux (2) ans.

Rédaction et signature de la clause de non-concurrence

Les modalités de fonctionnement de la clause de non-concurrence sont fixées dans le contrat de travail ou dans une lettre d’engagement. Le cas échéant, elle n’est pas valide et donc, non applicable.

Indemnisation de la clause de non-concurrence

Comme le salarié n’est pas complètement libre dans son choix d’activité professionnelle, dans le cas où il retrouverait du travail, l’entreprise doit l’indemniser. En effet, par respect de la clause de non-concurrence, le salarié a interdiction de travailler dans son domaine d’expertise, ce qui donne droit au versement d’une indemnité compensatrice en plus du salaire de son nouvel emploi.

Cette contrepartie financière doit directement être prévue dans la clause de non-concurrence. Le versement de cette indemnité ne dépend pas du mode de rupture du contrat de travail. En d’autres termes, le salarié a toujours droit à cette compensation qu’il soit licencié pour faute grave ou dans le cas d’une procédure de liquidation de l’entreprise.

Calcul de l’indemnité

Il est avant tout important de préciser que le montant versé en termes d’indemnité dans le cadre d’une clause de non-concurrence ne peut être dérisoire. Il appartient à l’employeur de définir le montant minimum de l’indemnité à verser, mais généralement, il est proportionnel à la durée de la clause de non-concurrence et au degré de restriction, dont le salarié fait l’objet, au moins égal à 25 % ses revenus antérieurs.

Si l’employeur venait à fixer le montant de la contrepartie financière qu’il doit verser, le calcul se fera sur la base de la rémunération brute du salarié sur les trois ou douze derniers mois.

Modalités de versement

L’indemnisation intervient à la date de départ effective du salarié de l’entreprise et le versement peut se faire en :

  • Une seule fois, c’est-à-dire à la rupture du contrat de travail ;
  • Plusieurs fois, de façon périodique, chaque mois ou tous les trois mois ou plus.

Un versement par anticipation n’est cependant pas possible, c’est-à-dire pendant l’exécution même du contrat de travail.

Le concept de la concurrence en entreprise

Les exceptions et les limites de la clause de non-concurrence

Les exceptions légales

Pour être licite, la clause de non-concurrence doit respecter les conditions strictes et cumulatives posées par la jurisprudence. Il s’agit de :

  • Limite temporelle ;
  • Limite géographique ;
  • Les intérêts légitimes de l’entreprise ;
  • L’indemnité compensatrice ;
  • Les caractéristiques de l’emploi du salarié.

Si la clause respecte toutes ces conditions, le salarié ne peut contourner cette interdiction de concurrence qu’à travers une demande qu’il aura préalablement formulée pour son annulation. Effectivement, l’employeur est totalement libre d’adhérer ou non à sa requête.

Toutefois, l’acceptation de la demande du salarié ne doit en aucun cas donner lieu à une forme quelconque de discrimination de la part de l’employeur.

Les cas de nullité de la clause de non-concurrence

Le caractère illicite de la clause de non-concurrence permet au salarié de demander qu’elle soit nulle. Les conditions de validité étant cumulatives, strictes et relatives aux intérêts de l’entreprise, l’employeur ne peut cependant pas faire cette demande.

Les cas de clause de non-concurrence illicite ne sont pas rares. Dans cette hypothèse, la jurisprudence considère qu’un salarié confronté à une telle clause doit prouver le préjudice qui pèse sur lui pour obtenir une indemnisation. Elle précise également que l’existence d’un préjudice ainsi que l’évaluation de celui-ci doit être portée au regard et à l’appréciation des juges du fond.

Malgré l’annulation de la clause, le salarié peut conserver les indemnités que son employeur a versées, préalablement à la constatation de la nullité de la clause. En effet, la Cour de cassation considère que le respect d’une clause de non-concurrence illicite est préjudiciable pour le salarié, ce qui mérite réparation.

Les conséquences de la violation de la clause de non-concurrence

En cas de violation de la clause :

  • L’employeur a le droit de verser, en termes de contrepartie financière, que le montant dû pour la période pendant laquelle le salarié a respecté son engagement de non-concurrence ;
  • Le salarié doit nécessairement payer des dommages et intérêts pour réparer le préjudice subi par son ancien employeur. Le montant de cette réparation peut être prévu par le contrat de manière forfaitaire, dans une clause pénale ;
  • Le cas échéant, le salarié peut être sujet à une exécution en nature telle que la résiliation de son nouveau contrat de travail ou la fermeture de son activité s’il était à son compte ;
  • L’entreprise dans laquelle le salarié a travaillé avant peut, si elle le souhaite et sous condition que la clause soit valide, engager la responsabilité de l’entreprise concurrente, nouvel employeur du salarié. En ce sens, le nouvel employeur doit obligatoirement résilier le contrat de travail en cours.

L’arrêt du versement des indemnités par l’employeur implique que le salarié est libéré de son interdiction et n’a plus d’obligation envers ce dernier.

La renégociation et la levée de la clause de non-concurrence

Renégociation de la clause de non-concurrence

Comme il est susmentionné, l’employeur est libre d’intégrer ou non une clause de non-concurrence dans un contrat de travail. Elle n’est donc pas nécessairement prévue dans un contrat et peut, en ce sens, donner lieu à une négociation. Les parties peuvent ainsi négocier sur la contrepartie financière à verser au salarié, qui peut être à hauteur de 50 % du montant de son salaire brut.

Levée de la clause de non-concurrence

Deux situations peuvent apparaître en cas de renonciation de la clause de non-concurrence :

  • Les conditions sont prévues par la convention collective ou le contrat de travail qui autorise l’employeur à lever la clause de non-concurrence. Il est alors ici question de renonciation unilatérale. La décision de lever ou pas la clause de non-concurrence appartient alors à l’employeur ;
  • Les conditions de la clause de non-concurrence ne sont ni fixées par le contrat de travail ni par la convention collective. Dans ce cas, l’employeur peut renoncer à la clause, mais avec l’accord préalable du salarié.

Lorsque la renonciation est effective :

  • Le salarié est entièrement libéré de l’interdiction de concurrence ;
  • L’employeur est défait de ses obligations de versement d’une contrepartie financière en faveur du salarié.

Pour cela, la renonciation doit se faire clairement, en bonne et due forme, suivant le délai prévu par la loi. Par ailleurs, le salarié doit être informé de cette renonciation via une lettre recommandée avec accusé de réception.

Conclusion

La clause de non-concurrence se définit par une interdiction à l’encontre du salarié, de travailler dans une entreprise concurrente sur une fonction équivalente à la précédente ou d’exercer une activité similaire, relevant d’une compétence ou savoir-faire technique pouvant porter préjudice à l’entreprise. Pour ne pas être illicite, cette clause doit respecter des conditions strictement encadrées par loi. Les intérêts de l’employeur et de l’employé seront ainsi équilibrés. L’entreprise pourra protéger son activité et le salarié, percevoir une compensation financière, dès qu’il met fin à son contrat de travail.

Frédéric

Conseiller en reconversion professionnelle, Frédéric effectue des bilans de compétences afin de déterminer entre autres les motivations, les besoins, le potentiel ainsi que les aptitudes des travailleurs, et d’établir avec eux de nouveaux plans de carrière. Hormis les bilans, il se charge du coaching et de l’accompagnement de ses clients vers leur nouvel emploi.